Jalousie déguisée en indifférence : décrypter les relations père-fils

Dans le récit d’Ovide, Dédale délaisse son fils, il oublie de le surveiller (pendant leur fuite de Crète) ; il ne remarque pas que, depuis un certain moment, Icare n’était plus en train de le suivre. C’est ainsi qu’Icare se rapproche du danger, danger qui exprime aussi le désir de liberté et l’émancipation du fils à l’égard du père. Mais Icare se retrouve seul face au danger, le père l’a abandonné : il n’a pas su le préparer, le soutenir dans le vol qui l’aurait conduit à l’indépendance, à l’autonomie, à l’affranchissement du pouvoir paternel.

On oublie souvent que le père d’Icare, Dédale, est jaloux. Jaloux de celui qui aura le talent, le courage ou simplement l’occasion de le dépasser ; de celui qui, dans l’ordre structural des choses, prendra sa place : Dédale est jaloux de son fils. Que celui-ci soit son fils naturel ou non n’a pas d’importance : pour celui qui est – ou mieux, qui choisit de se mettre – en position de père, tout homme peut devenir un fils, rival et assassin.

Dans le mythe, Dédale, architecte hors pair, d’une ingéniosité et capacités largement reconnues, est jaloux de son neveu Thalos. Thalos avait fait preuve, dès son plus jeune âge, d’un talent qui lui aurait sûrement permis de rapidement dépasser son oncle, qui se trouve en position de maître et père. Trop rapidement du goût de Dédale, qui ne supporte pas les compliments adressés au jeune apprenti, ni la renommée de ses capacités et sa réussite. Il décide de le tuer.

https://www.cairn.info/revue-cahiers-de-psychologie-clinique-2011-1-page-61.htm